Ca craint l'Europe telle qu'elle existe !

Publié le par Espiel71 Militante

Lette du député Partick Le Hyaric

Compte-rendu de la session du Parlement européen Du 8 au 11 Février 2010

Posted: 22 Feb 2010 09:10 AM PST

 

Voici les éléments essentiels de la session du Parlement européen qui s’est réuni du 8 au 11 février 2010. 

Le fait marquant de la semaine est l’approbation en un seul vote du collège des Commissaires de la Commission « Barroso » par le Parlement européen. Mais que ce soit avant son intronisation, avec le débat sur les suppressions d’emplois d’Opel en Europe, ou après, avec le débat sur la situation des pays membres de l’Euro en difficultés, les réponses données par la nouvelle Commission restent dans la logique des traités ultra-libéraux, et toujours formulées dans une langue de bois insupportable.

Le Parlement a par contre rejeté l’accord SWIFT qui devait renouveler aux autorités américaines le libre accès aux données des comptes bancaires des citoyens européens. Ce refus de donner aux nord-américains un chèque en blanc sur l’accès à notre vie privée via nos achats, nos retraits, nos déplacements,  est une victoire pour les droits fondamentaux du citoyen européen.

 

Election de la nouvelle Commission Barroso : les mêmes principes de concurrence et de liberté totale du marché demeurent

Mardi 9 février, le Parlement européen a approuvé en un seul vote la composition de la nouvelle Commission de José Manuel Barroso. Après avoir reconduit Barroso à ses fonctions en septembre par le jeu des alliances entre conservateurs du PPE (dont l’UMP), libéraux et une partie des socialistes européens (les socialistes français ont voté contre, ainsi qu’Europe-Ecologie), le Parlement a reproduit le même équilibre pour assurer au nouveau collège des Commissaires une confortable majorité.

Cette nouvelle Commission est encore plus à droite que la précédente (13 conservateurs, 8 libéraux et 6 socialistes). Le principal message politique qui est ressorti des auditions des Commissaires par le Parlement européen est l’application du Traité de Lisbonne. Or c’est ce traité qui fait primer la loi de la concurrence sur les droits sociaux et qui interdit à l’Europe une aide coordonnée aux Etats-membres les plus durement touchés par la crise économique comme la Grèce.

Comme l’a fait remarquer le Président de notre groupe de la Gauche Unitaire Européenne – Gauche Verte Nordique au Parlement, mon ami Lothar Bisky de Die Linke: « Les orientations politiques de la nouvelle Commission n’offrent aucune stratégie pour plus de justice sociale. Elles ne protègent pas l’Europe de la crise et ne fournissent pas de base pour s’attaquer avec succès à la pauvreté et l’exclusion sociale ».  

 

Opel: une gestion antisociale

Lundi 8 février, le Parlement européen a débattu de la fermeture cette année de l’Usine Opel à Anvers.

Le cas Opel est un condensé de ce que l’Europe de la concurrence « pure et parfaite » peut faire : mettre en concurrence les travailleurs d’une même entreprise, en faisant jouer les uns contres les autres les sites du groupe afin d’améliorer la productivité tout en réduisant les charges salariales, et mettre en concurrence des Etats, par un chantage à la subvention publique, les « plus offrants » subissant « moins » de suppressions d’emplois sur leur territoire.

A ce jeu où tout le monde perd, les salariés d’Opel Anvers ont été les premiers sacrifiés. Sur les huit à dix milles postes que s’apprête à supprimer la direction d’Opel en Europe,  2 600 concerneront le site d’Anvers. Mais Opel va encore plus loin, en plus de ces milliers de licenciements, Opel demande 2,7 milliards d’euros aux Etats-Membres de l’Union européenne pour maintenir son activité.

La vision qu’a la Commission de cette tragédie est tout aussi alarmante : là où les Etats accordent des aides pour préserver l’emploi localement, la Commission ne voit que distorsion de la concurrence pouvant entraver le marché intérieur, tel était le cas pour les aides françaises à Renault pour maintenir des emplois en France. La Commission acte la fermeture en disant par avance qu’on va mettre quelques pansements sur la douleur des ouvriers licenciés sous forme de petites aides sociales pendant que l’entreprise continuera d’engranger ses profits ! 

Dans mon intervention j’ai rappelé que ce n’est nullement une logique industrielle qui prévaut à la décision de fermeture d’Opel Anvers, l’entreprise a réalisé 3,4 millions d’euros de profit, mais bien celle de la rentabilité du capital et de la mise en concurrence des travailleurs. Car Opel ferme ici pour aller exploiter des travailleurs sud-coréens.  

Cette gestion est antisociale, elle se fait contre les territoires de l’Union européenne en brisant leur dynamisme et génère aujourd’hui des gâchis énormes.

J’ai donc demandé à la Commission :

  • Une nouvelle stratégie européenne de coopération entre les groupes automobiles pour la recherche de nouveaux véhicules écologiques,
  • Un effort de la Banque Centrale Européenne pour un crédit en faveur de l’emploi, de la formation et l’innovation,
  • Une directive renforçant le pouvoir des salariés sur les décisions de leur entreprise  via les comités d’entreprise ou de groupe, ainsi qu’une règle européenne permettant l’accès au bilan de toutes les entités d’un groupe pour que les représentants des salariés aient une vue d’ensemble de la santé financière de celui-ci.

 

J’ai repris cette demande dans une question écrite à la Commission et au Conseil ainsi que dans des amendements à un texte sur la responsabilité sociale des entreprises. pour la vidéo cliquez ici

Eurozone: un nouveau projet est nécessaire

Mardi 9 février le Parlement européen a débattu de la situation des pays en difficultés de la zone Euro. La crise économique a grandement mis à mal les finances de ces Etats, d’abord pris en otage par les établissements financiers qu’ils ont dû sauver, ensuite obligés de faire face au coûts économiques et sociaux engendrés par la crise. Les mêmes qui ont bénéficié du sauvetage des banques par les Etats spéculent désormais sur la faillite des pays les plus durement atteints par la crise : Grèce, Portugal, Espagne aujourd’hui, Italie et d’autres demain. Mais plutôt que faire face à ces attaques en présentant un front commun, c’est isolément que les Etats européens doivent résister à ces attaques, en pratiquant -pressés par la Commission- des coupes drastiques  dans le financement de la protection sociale (santé, chômage, retraite, aides aux plus démunis…).

Dans mon intervention j’ai rappelé ces dures réalités ainsi que le carcan constitué par les traités de Maastricht et de Lisbonne, qui empêchent toute réponse commune. La liberté totale des capitaux inscrite dans ces traités a permis la mise en concurrence des systèmes fiscaux des Etats aux dépends de leurs finances. L’indépendance de la Banque Centrale et ses statuts interdisent toute aide à un Etat en difficulté, alors que la même Banque Centrale a prêté gratuitement de l’argent aux banques nationales, qu’elles mêmes ont reprêté à des taux d’intérêt d’environ 6%, ceci explique d’ailleurs la remontée de leurs profits.

Afin de ne pas faire payer cette crise aux citoyens j’ai demandé une refonte des objectifs de notre politique économique commune autour de nouveaux critères :

  • Un pacte de développement humain pour l’emploi, le travail, le financement d’infrastructure écologiques.
  • Un Euro qui soit une monnaie commune solidaire au service des peuples et une Banque Centrale favorisant par le crédit sélectif  l’emploi, la formation, et la protection de l’environnement.
  • La lutte contre la fraude fiscale, les paradis fiscaux et la taxation des opérations spéculatives.

 

A ce sujet, notre groupe a porté l’adresse suivante au Conseil européen, qui se réunissait le jeudi 11 février :

FACE A LA CRISE DES MESURES D’URGENCE S’IMPOSENT !

Les chefs d’Etats et de gouvernement se réunissent à Bruxelles le 11 février pour débattre de la stratégie économique de l’Union.

Considérant l’ampleur de la crise économique, financière et sociale qui frappe de plein fouet la Grèce, l’Espagne, le Portugal et d’autres pays comme l’Irlande et la Belgique;

Considérant qu’un redressement budgétaire ne peut s’accompagner par une régression humaine et sociale;

Considérant que depuis le début de la crise le fardeau de la dette a été porté par les Etats et non par les agents privés qui l’avaient crée;

Considérant que les Etats ont massivement financé les banques et le système financier spéculatif (selon l’OCDE, la crise a couté 11.000 milliards de dollars aux banques centrales et aux gouvernements) sans avoir obtenu la moindre contrepartie en termes d’emplois et de salaires.

- Demande aux chefs d’Etats et de gouvernement de s’abstenir d’imposer des mesures d’austérité et de rigueur sociale pour les populations au nom de leur redressement budgétaire;

- Demande la nécessaire refonte des institutions de la zone Euro et du système financier international comme promis par le G20 et jamais effectuée;

- Demande aux chefs d’Etats et de gouvernement d’entreprendre des mesures concrètes pour mettre fin aux fonds spéculatifs, aux paradis fiscaux et à l’évasion fiscale; de dompter le marché des produits dérivés, et de contrôler les agences de notation qui continuent de prendre des décisions perturbantes;

- Demande la mise en place de mécanismes alternatifs aux agents de notation de la dette souveraines des Etats qui relèvent du champ public;

- Demande de remplacer le pacte de stabilité et de croissance devenu obsolète car aucun pays de la zone Euro est à même de le respecter, par un pacte de solidarité sociale pour l’emploi et la formation, et de lutte contre la pauvreté garantissant un revenu minimum pour tous, et l’arrêt de la flexibilisation du marché du travail;

- Demande des mesures fiscales pour taxer les multinationales et les mouvements des capitaux spéculatifs;

- Demande la redéfinition du rôle de la Banque Centrale européenne qui intégrerait, grâce à          l’impulsion d’un nouveau type de crédit pour un développement durable, pour l’emploi, la formation, la recherche, des objectifs de croissance, d’emploi, et pas seulement de stabilité des prix.

 

Clore le chapitre Guantanamo

Mardi 9 février le Parlement européen a demandé à la Commission de s’impliquer davantage dans la fermeture de la prison de Guantanamo. Mon ami Helmut Scholz,  membre de Die Linke et eurodéputé allemand de notre groupe, a affirmé que les Européens étaient coresponsables de la fermeture de Guantanamo et a exhorté la nouvelle Haute-Représentante pour les affaires étrangères, l’anglaise Catherine Ashton, à « clore ce chapitre honteux et de rendre Guantánamo à Cuba ».

Palestine: initiative de solidarité du groupe de la Gauche Unitaire Européenne – Gauche Verte Nordique avec le peuple palestinien

Mardi 9 février, lors de la réunion de notre groupe de la Gauche Unitaire Européenne – Gauche Verte Nordique, nous nous sommes grandement inquiétés de la vague d’arrestations qui frappe les militants des droits de l’Homme et de la cause palestinienne en Israël. Ainsi, plusieurs ONG et les locaux du Parti du Peuple Palestinien (Palestinian People’s Party) ont vu ce lundi 8 février leurs locaux perquisitionnés par l’armée israélienne et certains militants arrêtés. Nous avons donc envoyé un message exprimant notre solidarité au peuple palestinien et réitérant nos demandes d’arrêt immédiat de l’occupation de la Palestine et la création d’un Etat palestinien viable avec Jérusalem-Est comme capitale.

Mercredi 10 nous avons également fait savoir  notre plein soutien à la nomination du Docteur Moustafa Barghouthi pour le prix Nobel de la paix 2010. Cette nomination « représente une contribution pour une reconnaissance internationale du mouvement palestinien de non-violence comme un outil efficace et significatif de la lutte quotidienne du peuple palestinien contre une occupation permanente, contre un Mur qui limite toute liberté de mouvement, contre l’expansion des colonies en Cisjordanie, et aussi à Jérusalem-est ».

Les fonds pour la rénovation de l’habitat des personnes défavorisées en milieu urbain désormais disponibles aux personnes habitant les campagnes.

Mercredi 10 février, le Parlement européen a adopté en première lecture un projet législatif visant à mieux répartir l’enveloppe des fonds européens pour la rénovation des logements des personnes défavorisées. Jusqu’à présent le Fonds européen de développement régional (FEDER) ne finançait que la rénovation de l’habitat urbain de personnes défavorisées. Mais avec l’adhésion des pays de l’Est (12 entre 2004 et 2007) c’est une nouvelle réalité qui s’est imposée, beaucoup de personnes défavorisées de ces pays vivant encore en milieu rural. Le projet législatif qui a été adopté vise à modifier les conditions du FEDER pour que la rénovation de logements existants, ou leur remplacement par de nouvelles habitations, se fasse indépendamment de la zone d’habitat où ils sont situés (urbaine ou rurale). Le nombre de personnes pouvant demander ces aides est donc étendu, mais il reste encore à accorder plus de fonds pour financer ces rénovations importantes pour la vie des citoyens.

Débat sur le Sommet de Copenhague: un aveu d’échec

Le parlement a reconnu ce mercredi 10 février l’échec du Sommet de Copenhague, en qualifiant l’accord de « décevant ». Certains Etats essaient déjà de prendre prétexte de la crise pour revenir sur leurs engagements de réduire leurs émissions de carbone de 20% d’ici 2020 si aucun accord n’est atteint. Mais le Parlement a tenu à réaffirmer son objectif d’une réduction de 30% en cas d’accord international. Le rappel est important, la Commission ne doit pas se laisser forcer la main par les Etats trop soucieux de ménager leurs industries, car c’est bien d’ambition dont nous avons besoin pour faire face à un problème aussi grave que le réchauffement climatique.

Thon rouge et autres espèce menacées : interdiction du commerce international du Thon rouge, mais maintien de la pêche traditionnelle

La Commission devant représenter l’Union européenne lors de la Conférence sur le commerce international des espèces en voie d’extinction (CITE), le Parlement a défini les lignes de son mandat. Ces lignes recommandent entre autres d’interdire le commerce international du thon rouge et de l’ours blanc et demandent des mesures supplémentaires pour enrayer le déclin des grands félins comme le tigre.

Concernant le Thon rouge, le Parlement recommande l’interdiction du commerce international  à condition que l’on en permette néanmoins la pêche artisanale sur les côtes pour alimenter le marché local et que des aides supplémentaires soient accordées aux petits pécheurs pour compenser la perte de cette ressource. Ainsi la ressource serait préservée tout en ménageant les pécheurs et les consommateurs européens. Actuellement, 80% de la pêche est exportée en Asie, la pêche artisanale, même avec ses rendements plus faibles, sera donc à même de répondre à la demande européenne.

Adhésion de la Croatie, de la Turquie et de la Macédoine : Feu vert à la Croatie, sérieux doute sur la Turquie et toujours le problème du nom pour la Macédoine

Mercredi 10 février, le Parlement a adopté les rapports de suivi d’adhésion de ces trois candidats souhaitant rejoindre l’Union européenne.

La Croatie semble avoir la voie libre si elle continue sa réforme du système judiciaire, coopère pleinement avec le Tribunal Pénal International pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) et lutte efficacement contre le crime organisé.

Pour la Turquie, les évolutions positives en 2009 sont restées « limitées » notamment concernant la liberté d’expression et le système judiciaire. L’interdiction récente du parti kurde DTP en décembre, que j’avais condamnée, ainsi que les accusations portées sur des leaders kurdes ne sont surement pas étrangères à cette analyse. Plusieurs leaders kurdes dont Leyla Zana étaient présents le jeudi 4 février à Bruxelles à notre initiative afin de nous présenter les interdictions et arrestations du pouvoir turc auxquels ils sont confrontés.

La Macédoine fait face à un problème d’une autre nature concernant le nom officiel du pays. En effet la Grèce, qui a une province du même nom, refuse de voir un de ses voisins s’appeler Macédoine. Ce qui contraint ce pays à s’appeler officiellement Ancienne République Yougoslave de Macédoine (ARYM). Ce différent est un véritable poison dans les relations entre les deux pays et donc dans les perspectives d’adhésion de la Macédoine. Le Parlement européen a donc mis en garde contre toute escalade des parties notamment en se réappropriant l’histoire.

Rejet du projet SWIFT au Parlement européen: une victoire des droits fondamentaux du citoyen européen contre la tentative américaine de disposer des renseignements sur sa vie privée.

Jeudi 11 février, le Parlement européen s’est prononcé à une large majorité contre le projet d’accord « SWIFT » qui devait donner aux Etats-Unis un grand accès aux données bancaires des citoyens européens.

La « Society for Worldwide Interbank Financial Telecommunication », connue sous l’abréviation de SWIFT, est une société de droit belge basée près de Bruxelles, qui compte parmi ses adhérents les plus grosses banques mondiales. Cette société a constitué un réseau interbancaire, le réseau SWIFT, chargé, entre autres, de gérer des données bancaires. En 2006, les États-Unis ont confirmé avoir recours à SWIFT pour espionner illégalement les transactions financières internationales dans le but de pister des personnes soupçonnées de terrorisme.

C’est donc sous prétexte de lutte contre le terrorisme que cet accord devait permettre aux autorités nord-américaines de continuer de disposer encore librement des informations bancaires concernant chaque citoyen européen.

S’il avait été adopté, l’accord SWIFT aurait permis de rentrer dans les plus petits détails de notre vie privée : nos achats, nos retraits, nos déplacements.

En rejetant à une large majorité cet accord, le Parlement européen n’a pas suivi les appels du Conseil et de la Commission, relayés par le PPE (dont l’UMP), qui ont tenté une diversion de dernière minute en séance en essayant de reporter le vote pour mieux faire accepter l’accord dans quelques semaines. Il a au contraire écouté la mobilisation de ses citoyens et des groupes progressistes au Parlement européen pour la défense de leurs libertés.

C’est belle une victoire pour l’affirmation de nos droits contre la tentative des Etats-Unis de disposer des renseignements sur notre vie privée.


Publié dans Ce que je sais

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